2000, Semaine 37. "Marcel Légaut parle de Dieu."
chronique hebdomadaire sur le réseau des radios associées à Radio Notre-Dame
(3 millions d'auditeurs).
"Comment parler de Dieu sans en dire trop ? Comment en dire assez pour évoquer ce qui, en moi, est la réalité de ce que je vis ? " Ainsi, sexprimait Marcel Légaut en avril 1990, quelques mois avant sa mort
Marcel Légaut était un mathématicien sorti de lEcole Normale Supérieure. Après avoir enseigné dans les universités de Rennes et de Lyon, il avait renoncé à lenseignement supérieur pour se consacrer à la recherche religieuse tout en devenant à 40 ans un paysan de la Drôme. Marcel Légaut découvrait la présence de Dieu dans sa vie lors dactivités créatrices. "Je ne peux pas avoir cette créativité, disait-il, sans quelque chose qui ne dépend pas que de moi". Et, il ajoutait. "La perception dune présence dans une activité qui nest pas que de moi, comme les autres, révèle que je suis en dépendance. Cette prise de conscience de la dépendance mapparaît le premier point à comprendre pour ne pas parler de Dieu de façon insensée". Et, il ajoutait "Ce que je deviens nest pas la simple conséquence de ce que je fais par ma propre volonté".
Et pour conclure, Marcel Légaut déclarait "Si je reconnais que laction créatrice nest pas que de moi, dans le que se trouve la faille qui me permet datteindre une réalité dont je ne peux rien dire dautre, si ce nest quelle a pour moi une conséquence capitale pour ce que je deviens et ça, je crois que si on en dit plus, on en dit trop".
Je comprends bien que Marcel Légaut ait pu éprouver la présence de Dieu, la main de Dieu, chaque fois quil réalisait un objet nouveau, pensait une nouvelle idée, concevait une uvre nouvelle. En effet, on est toujours étonné lorsque nous créons, fusse quelque chose de très simple, étonné davoir pu obtenir un tel résultat qui nous semblait alors bien au-delà de nos possibilités dhomme ou de femme. Alors, chacun éprouve de la joie avec le sentiment davoir même petitement, marqué de son sceau léternité ici et maintenant.
Nallez pas croire que seuls les artistes, les savants ou bien les ingénieurs peuvent être des créateurs, je préférerais dailleurs plutôt dire innovateurs ! Des parents qui ouvrent à la vie leurs enfants, surtout ceux qui sont différents comme des trisomiques ou des autistes, le jeune enfant à lécole maternelle lors de ses premiers gribouillages, le cultivateur qui ruse avec la nature pour faire éclore de beaux fruits dune terre ingrate, tous les modestes ont cette dimension déternité en eux !
Marcel Légaut croit, car il sagit dun acte de foi, que cette dimension déternité dinnovateur est la marque de Dieu en lui, car il ne peut pas admettre que ça ne vienne que de lui et le que est capital pour Marcel Légaut. On pourrait aussi croire, dans un autre acte de bonne foi, que cette dimension fait partie de notre humanité uniquement. Homme de foi ou bien homme de bonne foi, réjouissons-nous dêtre des innovateurs !
Pourquoi pas ?
Bernard Baudelet.