5. Dieu intervient-il dans l'Histoire ?

Bien des maux dont nous souffrons sont imputables aux hommes: méchancetés, crimes, servitudes, esclavage, guerres de religion, guerres civiles. Mais aussi, un peu partout, chaque année a son lot de catastrophes naturelles et divers cataclysmes qu'on ne peut pas imputer aux hommes: séismes, éruptions volcaniques, cyclones, oura-gans, inondations, sécheresse, etc.

La problématique

Si Dieu est à la fois tout-puissant et infiniment bon, comment se fait-il, s'il en est le créateur, qu'il ait créé un monde d'une part si merveilleux, mais d'autre part avec tant de "ratés" biologiques ou cosmiques qu'on ne peut pas imputer aux hommes ? Comment se fait-il qu'il n'intervienne pas plus que ça pour nous sortir des difficultés que nous affrontons?

Dans l'Ancien Testament, on nous rebat les oreilles avec les nombreuses interventions de Dieu pour son peuple. S'il est intervenu dans le passé, pourquoi n'intervient-il plus? Et vice versa, s'il n'intervient pas aujourd'hui, qu'en est-il des récits de ses interventions autrefois ?

En particulier, lors de l'exode, l'esclavage que subissaient les Israélites en Egypte et dont ils ont été libérés, doit malgré tout avoir été moins tragique que la Shoah et Auschwitz (ils ont même regretté la nourriture dont ils avaient bénéficié en Egypte: Nb 11.6)

Si la prière n'a pas suffi pour obtenir satisfaction, peut-on dire que c'est parce qu'on n'a pas assez prié, pas de la façon qui convient? D'où les triduum, les neuvaines, le chapelet, le rosaire, le pèlerinage à genoux, etc.). Quel est ce Dieu qui a besoin de longues supplications pour s'émouvoir ?

Lors des inondations tragiques à la mi-décembre 1999, au Venezuela, l'évêque de Caracas les a imputées à nos péchés. Dieu se venge-t-il ? Lors des inondations dans la Somme en mars 2001, je n'ai pas entendu dire que quelqu'un ait exprimé ce genre d'interprétations.

En sens inverse, un sportif de Sao Paulo , au Brésil, disait récemment avec beaucoup de bon sens et d'humour, que "si le Seigneur devait exaucer toutes les prières des sportifs qui s'opposent, tous les match devraient se terminer par un score nul".

Dieu serait-il arbitraire, sadique ou impuissant ? Je refuse cette interprétation de la situation. Mais Dieu alors nous est incompréhensible. Il y a comme une règle du jeu qui nous échappe

Mais on a parfois essayé d'imaginer comment fonctionne cette règle du jeu en justifiant Dieu, c'est la théodicée de Leibntz (1710) après l'ouvrage de Hobbes sur La liberté, la nécessité et le hasard (1656). Sommes-nous, sans le comprendre, dans le meilleur des mondes?

Le séisme de Lisbonne en 1756 fait écrire par Voltaire en 1759 son Candide et Rousseau y répond en écrivant en 1764 une Lettre sur la Providence, où il fait remarquer que dans bien des cas, on pourrait s'en prémunir.

Même lorsqu'on est prévenu, on manque de prudence. C'est ainsi qu'il y a une cinquantaine de villes situées dans des zones sismiques, qui se développent rapidement et souvent sans précautions. Il existe des règles de constructions anti-sismiques; elles sont respectées à Los Angeles, souvent au Japon, mais ignorées en Turquie.

On cherche actuellement à prévoir les cyclones, peut-être pourra-t-on les détourner. On sait construire des barrages, on sait dans certains cas arrêter les guerres civiles. On limiterait bien des dégâts si on utilisait toutes les ressources de notre cerveau, car on n'en use que 10% et si on utilisait mieux nos capacités de bienveillance, au lieu de perdre beaucoup de nos capacités en querelles, en malveillance et malentendus.

Une composante de hasard

Nous sommes aussi affrontés à une composante de hasard. Le 31 octobre 2000, un avion de Egypt Air Line s'est abîmé en mer avec 21 occupants. Pour prolonger son séjour aux USA une femme, au dernier moment, avait renoncé à prendre cet avion. Elle a été sauvée.

Il y a quelques années, dans la banlieue sud de Paris, dans une villa, une maman dit à son fils: "Il fait beau, va dans le jardin". Peu après un petit avion fait une chute à cet endroit et écrase l'enfant. A qui peut-on l'imputer ?

Le goût du risque

Jusqu'à un certain point, surmonter des difficultés et des risques est souvent apprécié: "Qui ne risque rien, n'a rien", dit un proverbe.

Des hommes et des femmes trouvent parfois qu'ils n'ont pas assez de risques à surmonter et ils en inventent à leurs risques et périls pour accomplir des prouesses dont on peut rappeler les plus connuse:

- Les 24 heures du Mans, le Paris-Dakar, devenu le Dakar-Le Caire,

- La traversée de l'Atlantique en solitaire (Alain Gerbault et dernièrement Peggy Bouchet)

- Le Vendée-Globe, course autour du monde à la voile en solitaire, depuis 1996 avec Yvon Parlier

- Le saut en parachute différé ou vol libre, le saut à l'élastique

- Un long séjour sous terre (Michel Siffre, 62 jours).

- Alain Bombard a tenté et réussi une survie en mer, sans eau ni vivres, 65 jours.

- Un acrobate a traversé sur les mains 1400 km

- Un handicapé britannique a décidé de traverser l'Australie en fauteuil roulant, 2000 km.

- Un paraplégique veut atteindre le sommet du Kilimandjaro (6000 m d'altitude)

Bien entendu, il y a souvent des échecs, mais lorsqu'on réussit, quelle joie!

Et Dieu dans tout ça ?

Les catastrophes et bien plus encore nos querelles et nos guerres, ne sont pas provoquées par un Dieu irrité qui se venge.

Si je crois à un Dieu tout-puissant et infiniment bon, il est assez incompréhensible. Se peut-il que pour notre épanouissement, il nous mette dans un contexte qui comporte une part de hasard et de risque et qu'il s'interdise d'intervenir dans le monde physique?

Il nous confie une terre inachevée, avec une part de hasard et de risques à surmonter. Et, si l'on veut bien s'y prêter, il nous inspire et nous suggère les moyens d'une bonne gestion de la vie sur terre, de solidarité fraternelle avec, en perspective une vie éternelle. Pour conclure comment je crois, j'en viendrai enfin à résumer ma conception de la condition humaine en y incluant la vie éternelle dont fait partie notre destinée.


"JE CROIS, MAIS PARFOIS AUTREMENT" , Paul Abela
Edition L'Harmattan, collection "Chrétiens autrement" 160p. 14€,
ou chez l'auteur, 15 € port compris (52 rue Liancourt, 75014 Paris) 



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